Au moment où une bonne partie du monde occidental prend quelques semaines de vacances et voudrait oublier les mois qui ont précédé, marqués par la pandémie, le Covid sévit encore dans sa première phase aux Amériques et en Asie et semble même amorcer une deuxième phase en Europe et dans certains des pays asiatiques cités jusque-là en exemple pour leur maîtrise sanitaire. À la fin juillet, on avait atteint le niveau de 250 000 cas nouveaux par jour, les principaux bataillons étant fournis par les États-Unis, le Brésil et l’Inde. Quant au confinement, total ou partiel, il touchait encore 350 millions de personnes un peu partout dans le monde. Aux Etats-Unis, en Europe et en Chine, des laboratoires cherchent frénétiquement vaccins et traitements. Il en est un peu de même sur le plan économique. Le « retour à la normale » est en effet chaotique et les tensions géopolitiques remontent d’un cran à moins de cent jours d’élections américaines qui voient s’affronter deux improbables candidats.

Un petit vent d’optimisme économique
Commençons donc par la « bonne » nouvelle : la Chine a retrouvé le chemin de la croissance : + 3,2 % au deuxième trimestre et certainement la seule grande économie de la planète à ne pas être dans le rouge. Passons sous silence les – 41,2 % de Singapour, mais la Corée du Sud a enregistré un recul de 3,3 %. L’IFO anticipe – 11,9 % pour l’Allemagne, l’Australie est en récession pour la première fois depuis trente ans… La reprise chinoise est avant tout industrielle : les ventes de détail restent dans le rouge (– 1,8 % encore en juin). Mais les importations chinoises de matières premières ont toutes retrouvé le chemin de la croissance au second trimestre et les bilans sur le premier trimestre sont même impressionnants, à croire même que le Covid n’a pas eu lieu. Ceci a joué dans le rebond des marchés en particulier en ce qui concerne les métaux et le minerai de fer.
Face à la Chine, les États-Unis font pâle figure. D’après le Bureau of Economic Analysis, le PIB américain s’est contracté de 9,5 % au deuxième trimestre; la plus forte baisse depuis 1 946 (en rythme annuel cela donne – 32,9 %). Des baisses plus fortes n’étaient intervenues qu’aux premier et troisième trimestres 1932, au cœur de la Grande Dépression. Ceci étant, le consensus des économistes s’attendait à pire. L’économie américaine aura en tout cas bien besoin du plan de relance en négociation entre le Congrès et la Maison-Blanche et qui serait de l’ordre de $ 1 000 à $ 3 000 milliards. Ceci explique l’accès de faiblesse qu’a connu le dollar qui est revenu à son niveau du début de 2018 (et dont l’effet s’est fait sentir sur les marchés de commodités).
En Europe, on est plus modeste. Mais enfin, après quatre jours et quatre nuits de marchandages entre le « Club Med » et les radins sous le regard goguenard de quelques populistes hongrois et polonais, une fumée blanche est sortie du conclave de Bruxelles. Pour la première fois, l’Europe – en tant que telle – va emprunter sur les marchés financiers et plus de la moitié des € 750 milliards ira sous forme de subventions aux pays les plus affectés par le Covid. Malgré les réticences des radins, dignes héritiers de Margaret Thatcher, l’Europe est parvenue à un effort de solidarité dont on pouvait douter tant de sa capacité que de sa volonté. Il a fallu cependant consentir des rabais à certains et puis aussi fermer les yeux sur les pratiques des moins démocratiques. Mais un tel coup de pouce était bien nécessaire : le moteur franco-allemand a enregistré au deuxième trimestre des reculs respectifs de 13,8 % et de 10,1 %. Un pays comme l’Espagne, encore fortement marqué par le Covid en particulier en Catalogne, a perdu plus d’un million d’emplois.
Tempérons toutefois cette avalanche de mauvaises nouvelles : la plupart des chiffres publiés fin juillet sont « moins pires » que les prévisions datant de juin. Et puis, la plupart des indices anticipés sont bien orientés à l’image de ceux des directeurs d’achat (PMI) revenus à peu près partout au-dessus de 50, c’est-à-dire en zone d’expansion. C’est bien ce qu’ont compris les bourses mondiales qui ont fait presque l’impasse sur les mauvais résultats des grandes entreprises « classiques » et qui ont préféré rêver à la « nouvelle économie », d’Apple et Tesla. Le SP500 a réalisé en tout cas son meilleur trimestre (+ 19 %) depuis… 1998 ! Sauf aggravation nouvelle contraignant à une reprise du confinement (hypothèse malheureusement crédible), la page du Covid commencerait – bien lentement – à être tournée laissant derrière elle des monceaux de dettes, des entreprises fragilisées et des chiffres record de chômage et de pauvreté. Difficile dans ces conditions de rêver au « monde d’après ».

Philippe Chalmin

L’email a bien été copié

 

Ephémérides

6/07

• Sainte-Sophie de Constantinople redevient une mosquée
• Menaces américaines de taxes à hauteur de $ 1,3 milliard contre la France si la taxe GAFAM est mise en place
• Amende de $ 2 milliards pour Norilsk à la suite d’une pollution fluviale

13/07

• Les États-Unis mettent fin au régime préférentiel de Hong Kong
• L’amende d’Apple à propos de ses impôts en Irlande est annulée par la Cour de Justice européenne
• Le grand barrage d’Éthiopie commence à se remplir au grand dam de l’Égypte et du Soudan
• Décision de Boeing d’arrêter le 747
• La tonne de carbone dépasse les 30 euros
• 3,2 % de croissance en Chine au deuxième trimestre
• 600 000 morts du Covid au 19 juillet

20/07

• Record pour le prix de l’or et dollar au plus bas depuis deux ans
• Reprise du Covid en Europe
• Discussion aux États-Unis sur un nouveau plan de relance
• Deuxième trimestre : États-Unis – 9,5 %, France – 13,8 %