Par Philippe Chalmin
Les premiers jours de l’hiver, le froid, le besoin de se chauffer, le souci du gaz ! C’est bien le marché du gaz naturel qui fait la une de l’actualité en particulier dans une Europe que la hausse des cours de l’énergie est en train de précipiter vers la récession. À première vue, la situation européenne n’est pourtant pas catastrophique : l’automne a été doux et les stocks sont pleins – plus de 1 000 TWh. En moyenne, les prélèvements d’hiver s’élèvent à un peu plus de 550 TWh (la fourchette des dix dernières années va de 350 à 750 TWh) et donc normalement il y aura encore un volant de sécurité de gaz au printemps prochain. Les vrais problèmes sont ceux des prix tant du gaz – qui devraient osciller entre € 100 et € 150 le MWh – que de l’électricité et puis de la reconstitution des stocks pour préparer l’hiver 2024. D’ici là, la situation en Ukraine aura peut-être évolué. Si une victoire absolue de l’un ou l’autre camp paraît improbable, une « paix des braves » semble tout aussi éloignée : l’Europe pourrait donc vivre 2023 presque sans gaz russe, mais il faudra alors du GNL et la concurrence chinoise risque de faire grimper un peu plus les prix. Et cela d’autant plus que de Bruxelles à Berlin on a du mal à tirer les leçons de cette crise gazière : « Bien sûr à court terme, il nous faut du GNL, mais très vite nous n’en aurons plus besoin puisqu’il faut accélérer la transition énergétique ». Le résultat c’est que lorsque la Chine s’engage avec le Qatar pour 27 ans, l’Allemagne ne le fait que pour 15 ans et encore en se réservant le droit de réexporter ce gaz. On peut comprendre qu’États-Unis, Australie, Qatar et quelques autres préfèrent les débouchés asiatiques aux états d’âme européens ! En tout cas, leur facture d’énergie est le souci majeur des entreprises en Europe pour 2023.
Du côté du pétrole les soucis sont moindres : la demande stagne malgré des prix bien installés au-dessous de $ 100 le baril. Le pétrole russe vendu entre $ 15 et $ 30 en dessous du Brent a tiré le marché vers le bas. Il reste à voir quelles seront les conséquences du plafonnement à $ 60 le baril du prix du pétrole russe qu’ont décidé les pays du G7. Il n’est pas certain que la production et les exportations de pétrole brut russe baissent encore de manière significative. L’Europe qui a décidé d’un embargo sur le pétrole russe à compter du 5 décembre ne devrait pas avoir trop de problèmes pour rediriger ses flux. La vraie échéance est celle du 5 février avec l’embargo sur les produits pétroliers, car le diesel russe sera plus difficile à remplacer.
Avec le devenir de la guerre en Ukraine, l’autre grande interrogation est celle de la politique chinoise en ce qui concerne le Covid. Malgré les manifestations, Xi Jinping n’a guère de marges de manœuvre : non contenue de manière stricte, la vague actuelle d’Omicron pourrait faire des dégâts considérables parmi une population d’aînés peu ou mal vaccinés. Mais le maintien strict du zéro-Covid (avec début décembre encore l’équivalent d’un quart du PIB chinois confiné) condamne ce qu’il reste de la croissance chinoise et précipiterait un peu plus le monde aux portes de la récession. Tout ceci se retrouve dans la baisse des prix des matières premières industrielles (à l’image du coton) et celle des taux de fret des conteneurs (– 70 % en quelques mois,
un record !).
Une bulle enfin commence à exploser : celle des cryptodevises, dont la capitalisation, est passée en quelques semaines de $ 3 000 milliards à $ 830 milliards. La faillite de FTX tient à la fois de Madoff et d’Enron, mais en tout cas, elle pourrait bien sonner le glas de ces instruments dont le moindre défaut n’était pas leur empreinte environnementale.
Et puis à l’approche de Noël, il y avait quelques beaux cadeaux à faire lors de la semaine de ventes aux enchères à New York consacrée en novembre à l’art moderne : beaucoup de records et au total plus de $ 3 milliards de produits. Même en ces temps de « recesso-flation », l’humeur des « nouveaux riches » reste soutenue : moins de Russes ni de stars des cryptomonnaies certes, mais des bonus qui ont flambé un peu partout de Wall Street aux maisons de négoce…
Noël aux tisons, mais pas pour tous !
Ephémérides économiques
31/10
• Élection de Lula au Brésil
• Bénéfice d’Aramco au troisième trimestre 2022 : $ 42,4 milliards
• « Victoire » de Netanyahu en Israrel
• Hausse de 75 pb des taux de la Fed
7/11
• Ouverture de la COP27 à Charm el Cheikh en Égypte
• « Victoire » démocrate aux élections à mi-mandat aux États-Unis
• Faillite de FTX (cryptos)
• Baisse des exportations de la Chine en octobre (– 0,3 %)
• Record de ventes aux enchères à New York ($ 3 milliards)
14/11
• G20 à Bali : rencontre Xi-Biden
• 8 milliards d’habitants dans le monde
• Début du Mondial de football au Qatar
• Prolongation du corridor céréalier ukrainien en mer Noire
• Chute du fret-conteneurs : – 70 % en un an
• « Accord » en Égypte à la COP27
21/11
• Le baril de Brent en dessous de $ 90
• Accès de Covid en Chine
• Tensions autour des livraisons de gaz russe à la Moldavie
• Manifestations en Chine contre le « zéro-Covid »
28/11
• Mort de Yiang Zemin
• La baguette de pain française inscrite au patrimoine immatériel de l’humanité
• Dissensions autour du plafonnement du prix moyen du gaz en Europe et du prix du pétrole russe par le G7
• Bras de fer entre l’UE et la Hongrie
• Crise politique en Afrique du Sud
5/12
• Plafonnement du prix du pétrole russe à $ 60 le baril par les pays du G7 et l’UE
• Embargo européen sur le pétrole russe
• Assouplissement du zéro-Covid en Chine