Par Philippe Chalmin

À peine CyclOpe avait-il publié ses prévisions sur les marchés de commodités que rebondissait un débat lancé il y a déjà quelques semaines sur un éventuel nouveau « supercycle ». Et il est vrai que la flambée des cours en fin d’année et au début de 2021 pouvait inciter à ce type de réflexion de court terme comme l’illustre le graphique ci-joint tiré de The Economist. Sans parler de la conjoncture la plus récente, cette idée de supercycle nous paraît profondément erronée. L’expression d’ailleurs de supercycle n’a en elle-même aucun sens. Il y a effectivement depuis plus d’un siècle un cycle des prix des matières premières (mis en évidence par le grand historien Paul Bairoch et à sa suite par… votre serviteur), dont les points hauts – les crises – se situent en 1921, entre 1947 et 1953, 1972 et 1980, 2006 et 2014. Ce que nous vivons en 2020-2021 est d’une autre nature : plusieurs facteurs haussiers se cumulent en effet ; baisse du dollar, rattrapage post-covid au moins en Chine, incertitudes climatiques. Mais au-delà, la plupart des fondamentaux penchent du côté des excédents. Avant même la rupture du Nouvel an chinois, la plupart des marchés étaient d’ailleurs orientés à la baisse : c’était bien sûr le cas du GNL sur les marchés spot en Asie après les folies provoquées par des températures glaciales. Mais, le minerai de fer entamait un lent repli tout comme plusieurs métaux non ferreux. Par contre, les grains restaient tenus en haleine par les achats chinois en particulier de maïs et d’orge.
L’idée d’un supercycle (ou d’une flambée durable des cours sur plusieurs années nous paraît très franchement absurde, destinée peut-être à attirer quelques fonds à la recherche de sensations, un peu comme ces malheureux boursicoteurs qui sont passés fin janvier de GameSpot à l’argent !
En ce début d’année, il ne faut pas aussi occulter toutes les interrogations géopolitiques que le Covid nous a fait un peu oublier. Il y a bien sûr l’impérialisme chinois (le terme n’est plus trop fort) tel qu’il se manifeste le long des routes de la soie chez des fournisseurs potentiels de matières premières pour la Chine, de la Birmanie à la RDC ou au Brésil, tel aussi qu’il faut le comprendre face à l’Australie. De l’autre côté, il y a la feuille blanche de l’administration Biden dont les précédents, sous Obama, ne furent pas des plus glorieux. On attend les États-Unis sur l’Iran bien sûr, mais aussi face à la Russie et à la Turquie et puis bien sûr face à la Chine. L’Europe n’existe guère, mais de manière séparée UE et Royaume-Uni ont presque fait allégeance à la Chine, l’UE, poussée par l’Allemagne avec son accord sur l’investissement (CAI), le Royaume-Uni en proposant d’adhérer à la zone de libre l’échange du Pacifique autour de la Chine. En rétablissant des droits de douane sur l’aluminium en provenance des émirats, Joe Biden a en tout cas montré que, pour l’instant, la fibre domestique l’emportait sur un certain sentimentalisme multilatéral.
Les marchés vont maintenant entrer en hibernation : Covid pour les uns avec son cortège de confinements, Nouvel an pour les Chinois, mais sans trop de festivités. Une sale année du rat quand même !

Ephémérides

1/1

• Brexit !
• Présidence portugaise de l’UE

4/1

• Début de la vaccination en Europe et problèmes dans certains pays (France…)
• Majorité démocrate au Sénat américain
• Reconfinement au Royaume-Uni
• Répression chinoise à Hong Kong
• Fin de l’embargo saoudien sur le Qatar
• Forte hausse des prix des matières premières
• Fusion PSA-Fiat

11/1

• Flambée du gaz naturel liquéfié en Asie
• Suspension des réformes agricoles par la Cour suprême en Inde
• Donald Trump interdit de twitter

18/1

• Flambée des prix des grains
• Investiture de Joe Biden
• Retour des états-Unis à l’OMS et arrêt du projet d’oléoduc Keystone XL

25/1

• Forum de Davos virtuel
• 100 millions de cas « officiels » du Covid
• Apple franchit la barre des $ 100 milliards de chiffre d’affaires… trimestriel
• Faillite du conglomérat HNA en Chine

1/2

• Coup d’état en Birmanie
• Affaire Game Spot et ruée sur l’argent
• Mario Draghi, futur président du Conseil en Italie
• Confirmation du « double dip » en Europe (– 0,7 % au quatrième trimestre)

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