Par Philippe Chalmin
L’OMC est-elle menacée du même sort que sa voisine genevoise, la CNUCED ? La CNUCED avait connu son heure de gloire dans les années soixante-dix : en 1976, la quatrième CNUCED s’était tenue à Nairobi et avait lancé le Programme intégré sur les Produits de Base. Ce fut un échec total : déjà à la fin du siècle, plus aucun accord de stabilisation des prix des matières premières ne fonctionnait. La CNUCED sombra dans l’oubli et la quinzième CNUCED qui s’est tenue en octobre 2021 est passée totalement inaperçue même pour les spécialistes de commerce et de développement.
C’est que, pensait-on, au bord du lac, l’OMC avait pris le relais en lançant même, tout en accueillant la Chine, le cycle de « développement de Doha » en 2001, quelques semaines après les attentats du 11 septembre. Mais, voilà que l’OMC est prise de la même langueur que la CNUCED, langueur qui, à vrai dire, a toujours saisi les institutions internationales des bords du Léman, à commencer par la SDN de l’Entre-deux-guerres. L’OMC vient de tenir à Abu Dhabi sa treizième conférence ministérielle. Nul n’en a parlé et c’est au fond logique puisqu’il ne s’est rien passé. Tout y est bloqué à commencer par l’Organe de règlement des différends faute de juges que les États-Unis refusent de valider avec une admirable constance d’Obama à Biden en passant par Trump.
Il n’y a donc plus de gendarmes ni de tribunal. Les barrières douanières – et plus subtilement tous les obstacles possibles – ne cessent de se dresser. Récemment, quelques attaques de navires en mer Rouge ont révélé l’enchevêtrement de paradis fiscaux et de pavillons de complaisance qui est la règle dans le transport maritime. Le contournement des sanctions à l’encontre de la Russie a sollicité un peu plus l’imagination des uns et des autres.
À Genève, au fond, les négociants font plus pour les marchés que des institutions internationales qui n’ont même plus de légitimité.
Les marchés fonctionnent, nous dira-t-on ! Ils restent, quoique l’on pense de la spéculation, le fidèle écho des tensions de la planète : en forte baisse pour les vedettes de 2022, le blé (à moins de $ 200 la tonne), le nickel (à moins de $ 17 000 la tonne) et le gaz (à € 25 le MWh sur le TTF européen), presque stable pour le pétrole (autour de $ 80 le baril), en légère hausse déjà pour le cuivre ($ 8 500 la tonne) et puis à des niveaux record pour le cacao (bien au-delà de $ 6 000 la tonne) et le café Robusta ($ 3 300). Il y a eu, bien sûr, en ces dernières semaines, bien d’autres records à commencer par ceux des bourses de valeur (le CAC à plus de 8 000 !), mais aussi ceux de l’or ($ 2 141 l’once) et du bitcoin (proche de $ 70 000). Mais préférons le cacao et le café tant ils sont importants pour l’Afrique qui reste pour l’essentiel à l’écart des marchés et qui du Tigray au Kivu, du Soudan au Sahel subit de plein fouet la folie des hommes.
Ephémérides économiques
29/1
• Evergrande en liquidation judiciaire à Hong Kong
• Accord européen pour € 50 milliards d’aide à l’Ukraine
• Gel des négociations sur l’accord de libre-échange UE/Mercosur
5/2
• Année chinoise du dragon
• Changement de chef d’État-major de l’armée ukrainienne
• Baisse de 0,8 % des prix en Chine en janvier
12/2
• Glencore arrête l’usine de nickel de Koniambo en Nouvelle-Calédonie
• Mort d’Alexei Navalny
• Élection de Prabowo Subianto en Indonésie
• Repli ukrainien sur le front
• Le blé à Paris sous les € 200 la tonne pour la première fois depuis juillet 2021
19/2
• Le CAC 40 au-dessus de 7 800
• Troisième année de guerre en Ukraine
• Nvidia, troisième capitalisation mondiale
26/2
• Échec de la réunion de l’OMC à Abu Dhabi
• La Suède entre dans l’OTAN
• Le carbone à € 55 et le bitcoin à plus de $ 60 000
4/3
• Réunion de l’Assemblée nationale en Chine : objectif de 5 % de croissance
en 2024
• Victoires de Trump et Biden au « super Tuesday »
• Record historique pour l’or ($ 2 141 l’once) et le bitcoin ($ 69 324)
et pour le CAC 40 au-dessus de 8 000
• Un navire coulé en mer Rouge